Segalen s’est initié à l’art chinois dès sa prime jeunesse; il est de la Bretagne qu’on appelle la Chine de l’Occident et dont les habitants possèdent tant d’objets d’Extrême-Orient. Il est influencé par son oncle Pierre Charles Cras, chirurgien et médecin de la marine qui se trouvait à Saïgon pendant l'expédition de Cochinchine. Ainsi la Chine occupe une place remarquable dans la pensée et les sentiments de Segalen qui est désormais inséparable de ce pays ; son œuvre se présente comme une référence nécessaire à tous ceux qui s’intéressent à étudier la Chine.
En 1899 Segalen a rencontré Huysmans qui a ouvert à son imagination les plus vastes perspectives et l’a aidé à découvrir un monde plein d’idées et de sensations. Après cette rencontre, le jeune Segalen est curieux de voir le monde et d’en goûter l’ivresse. S’embarquant pour Tahiti le 10 octobre 1902, il a commencé son premier voyage qui a continué jusqu’à 1905. Là, le médecin français était soucieux de l’état physiologique et moral des gens avec lesquels il vivait. Observant la ruine, il accuse les Européens et les tient pour responsables de l’agonie de la race maorie.
Après son retour à Paris, Segalen s’est mis à apprendre le chinois, y voyant un nouveau champ d’inspiration littéraire. Accompagné d’Auguste Gilbert de Voisins, il entreprend son expédition archéologique en 1909, visant à poursuivre le levé hydrographique du Yangzijiang. Cette fois, il va à des provinces reculées, rarement explorées par des Européens, voyageant à pied ou à cheval. Il tente de restaurer la vieille Chine pour «ressusciter non seulement un univers disparu, mais aussi la part du mythe et de fiction qu’il renfermait.» Disciple d’Edouard Chavannes, archéologue sinologue, Segalen n’a qu’un but : donner souffle et voix à la civilisation chinoise dont il exhume les fondements. N’a-t-il pas découvert le mausolée de Che-Chouang-Ti. Il a vécu à Pékin, attentif à tout ce qui se passe ; il en résulte quatre de ses principaux livres : Immémoriaux, Stèles, Essai sur l’exotisme et Equipée.